[Carnet d’auteur] Julien Griffon sur son jeu Ni Plus Ni Moins

Principe du jeu

Ni plus ni moins est un jeu de questions-réponses coopératif dans lequel il faut retrouver le chiffre qu’une personne tient en main en lui posant des questions imposées par des cartes. Les réponses autorisées sont « c’est plus », « c’est moins », « c’est ça » ou « je ne sais pas ». Par exemple, si j’ai le 6 en main et qu’on m’annonce « Le nombre de petits cochons », je répondrai « c’est plus ».

L’objectif est d’enchaîner 7 cartes Chiffre le plus rapidement possible. De 3 à 5 joueurs, c’est ainsi que se joue NPNM. Un mode par équipe permet cependant de monter jusqu’à 10 joueurs jouant en alternance.

Pour arriver à ce jeu, il m’aura fallu plusieurs semaines de travail et l’aide de beaucoup de monde, et notamment d’Adrien, mon éditeur (Letheia), une fois qu’il s’était engagé à publier le jeu.

logo Letheia

Le nombre d’itérations avant d’arriver au jeu actuel. C’est plus !

Tout a commencé à Essen, en octobre 2022 alors que nous partagions un appartement avec l’équipe d’Entre 2 chaises. Je me réveille un matin avec une idée en tête, comma ça avait été le cas pour Yōkai.

couverture de Yokai

Elle me semble suffisamment simple à mettre en œuvre pour infliger à mes compagnons un premier test au petit-déjeuner. L’idée : chaque joueur a un chiffre en main et l’objectif commun est de retrouver la somme des chiffres en se posant des questions que chacun invente librement. Évidemment, les mêmes questions revenaient tout le temps : « l’âge de ton fils », « le nombre de repas que tu fais chaque jour », « ton heure habituelle de lever », etc.

En plus, c’était extrêmement difficile ! À tel point que j’ai dû passer en mode observateur pour calculer la somme pendant que les autres jouaient. Ils se souviendront longtemps de ce réveil un rien violent !

Ce premier test, loin d’être concluant, m’a quand même donné envie d’explorer un peu. Je voulais voir si je trouvais un moyen de faire fonctionner le jeu. La première amélioration était évidente : ne donner un chiffre à deviner qu’à un seul joueur. Il restait cependant à trouver une solution pour les questions. J’ai essayé différentes solutions pour que les joueurs génèrent des questions pendant la partie… mais rien ne semblait vouloir fonctionner.

L’un de mes testeurs (Fred, auteur de La Cabane à potions, chez Blue Orange, et de Brigantin, qu’il a auto-édité) me parle encore régulièrement de cette partie qu’il a passée à chercher des mots dans un livre pendant que les autres joueurs s’amusaient ! Je me suis donc résolu à adopter la solution qui resterait jusqu’à la fin, en rédigeant les questions pour les joueurs.

La difficulté, avec cette solution, était de trouver suffisamment de questions. J’ai passé quelques semaines à me promener avec un carnet et un crayon en poche, notant toutes les idées qui me passaient par la tête. Au bout du compte, je me retrouvais avec 400 questions, de quoi faire 80 cartes, à raison de cinq questions par carte. Suffisamment pour présenter le prototype à quelques éditeurs, au festival de Cannes.

Le nombre d’éditeurs qui ont eu le proto entre les mains. C’est moins !

Je n’avais pas pris beaucoup de rendez-vous pour ce festival. Alors, en croisant Adrien, au détour d’une allée, je lui proposai de lui montrer mon jeu, Plus ou moins, s’il avait un peu de temps pour moi. Rendez-vous fût pris pour le dimanche.

Entre temps un autre éditeur s’était montré intéressé, à qui je devais envoyer les fichiers pour qu’il puisse imprimer le prototype. Nous nous retrouvons donc le dimanche autour d’une petite table de l’espace pro de Cannes, avec Adrien, Luc (son associé avec qui il a monté Coco Cherry) et Aymeric (l’un des auteurs de Diferencio, publié par Kif Editions, qui connaissait déjà Plus ou moins).

Après une première partie, Adrien et Luc sont emballés par le jeu, qu’ils trouvent très drôle. Ils sont donc repartis avec mon prototype.

Moins d’un mois plus tard, après de nombreux tests et plusieurs échanges, Adrien me confirme qu’il veut faire le jeu. Après que j’en ai discuté avec l’autre éditeur potentiellement intéressé, nous signons donc un contrat et commençons le développement du jeu à proprement parler.

Il est à noter qu’Adrien a tout de suite accepté ma demande que le jeu soit fabriqué le plus localement possible. C’est l’un de mes critères de choix d’éditeur pour mes jeux.

Le nombre de personnes qui ont participé au développement. C’est plus !

Outre la partie graphique, il y avait deux axes de développement principaux : les questions et le matériel.

Avec mes 400 questions initiales, je me sentais au bout de ce que je pouvais faire. Pourtant, la moitié d’entre elles étaient probablement trop dures (« La distance séparant le soleil et Alpha du Centaure, en années lumières », quelqu’un ?).

Et puis, il nous en fallait près du double pour donner au jeu une rejouabilité suffisante. Adrien a amené de nombreuses idées, ce qui m’a aussi débloqué. Certaines valeurs étaient beaucoup plus faciles que d’autres et nous avons dû faire une sélection.

Le plus compliqué, cependant, était l’évaluation de la difficulté. Certaines questions dont la réponse me semblait évidente ne parlaient pas à Adrien et à certains testeurs, et inversement. Adrien a alors demandé à Luc de lui développer une application pour évaluer la difficulté des questions. Celle-ci a permis à 92 personnes de répondre séquentiellement à toutes les questions de culture générale que nous proposions.

Nous avons ainsi obtenu un pourcentage de bonnes réponses pour chaque question, qui nous a permis de supprimer les questions trop difficiles. Avantage collatéral, les commentaires laissés par certains testeurs nous ont permis de corriger certaines questions.

Petit détail amusant (ça m’a amusé, moi, en tout cas), les réponses à quelques questions étaient en grande majorité erronées mais convergeaient vers une même valeur. Comme le jeu demande simplement que les joueurs aient la même réponse, qu’elle soit correcte ou non, nous avons choisi de garder ces questions. C’est le cas, par exemple, du « nombre de pieds de l’Arc de Triomphe ».

Au final, ce sont probablement plus de 1 200 questions qui auront été imaginées pour n’en garder que 728 !

cartes de différents prototypes de Ni plus ni moins

Le nombre d’essais de matériel effectués par Adrien. Je ne sais pas !

Mon prototype ne contenait que des cartes, même pour le support de suivi des valeurs encore possibles et des cartes validées ou échouées. Sur les conseils du distributeur Blackrock, la solution d’un petit jeu ne contenant que des cartes a vite été abandonnée. Il lui préférait une version avec plus de présence sur la table. Adrien a donc fait plusieurs essais, notamment un système de réglette à la Qui est-ce ? qui faisait la part belle au plastique et qui s’est avéré peu pratique.

C’est finalement un plateau dans la boîte, avec deux flèches qui se rapprochent sur une jauge, qui a été retenu. Le trophée et la corbeille indiquent quant à eux élégamment où poser la carte Valeur lorsqu’elle est validée ou lorsque les joueurs commettent une erreur.

Côté graphique, Adrien et Vincent, le graphiste, avaient suivi une première piste peut convaincante aux yeux de Blackrock. C’est tout de même celle-ci qui a permis de définir les couleurs du jeu : un jaune bien pétillant en contraste avec du violet. Deux couleurs, me semble-t-il, pas si fréquentes sur les boîtes de jeu. Avec l’aspect très dynamique des illustrations, elles donnent bien l’idée d’un jeu rapide et malin.

essai de couverture

Le nombre de retours positifs. C’est plus !

Ni plus ni moins est disponible en boutique au prix recommandé de 20 € depuis juin 2024. Les retours sont très positifs. On loue particulièrement le travail d’écriture des questions, qui fait tout le sel du jeu. Il est idéal pour jouer entre amis, à l’apéritif, ou pour réunir toute la famille, des ados aux grands-parents, en essayant de trouver la question à laquelle l’autre saura répondre pour faire avancer le jeu.

Matériel de Ni plus ni moins tel qu'édité
Julien Griffon posant avec Ni Plus Ni Moins

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