[Independence Day] The Freaky 42, l’éditeur borderline, incubateur ludique, qui assume pleinement son indépendance et sa démarche éco-responsable

The Freaky 42

Pierre-Yves Bonnet, des Freaky 42 s’est prêté au petit jeu de l’interview de la série « Independence Day » qui se veut une présentation non exhaustive des éditeurs francophones de jeux de société. Vous connaissez peut-être l’univers renversant, corrosif, borderline et presque militant de The Freaky42 avec Zombie A-Social Club, Crazy Farmers and the Clotures électriques ou le Fantastique tarot Halluciné du docteur Zariel … et l’actualité du moment : le jeu d’ambiance Gare aux Relous en Kickstarter dès le 28 avril. Si ce n’est pas le cas – mais aussi si c’est le cas – c’est parti pour un entretien qui vaut se pesant de cacahuètes apéritives arrosées d’une de plusieurs ales bien fraiches, servies en terrasse. Tentons de percer à cœur The Freaky 42 !

Et pourquoi ne pas commencer par ça pour se mettre dans l’ambiance ?

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Car tout a un début, peux-tu nous parler de la genèse de cette maison d’édition complètement borderline ? Ses débuts, le premier jeu édité, et pourquoi ce nom fabuleux The Freaky 42 ?

D’où viennent les Freakys ? Comme beaucoup j’imagine : d’un projet qui dormait depuis des années et qui a attendu que toutes les planètes soient alignées pour voir le jour. En gros : une question d’opportunité.

J’avais un jeu qui me trainait en tête (Z@C), une idée bien précise des mécaniques et du design. Un pote à l’époque m’a proposé de financer les premières étapes. J’avais un peu de temps à ce moment-là. Je venais de finir de lire l’excellent « Le Club des Punks Contre l’Apocalypse Zombie » et… tout l’univers était là ! Bim ! Les planètes s’alignent, le projet ZAC sort de la nuit !

L’auteur du bouquin, Karim Berrouka, accepte sans problèmes qu’on en fasse le jeu, nous mets en contact avec Melvin qui part sur les premières illustrations, très vite… pas mal de bières et séances de taf plus tard : le proto est fait. Tout ça en quelques semaines à peine. Elle est belle l’histoire jusque-là non ?

Le truc, c’est qu’on a pêché à vouloir trop en faire : le jeu était « verrouillé » et marqué par un certain humour un chouia trop noir pour les maisons d’éditions consensuelles. Et c’est vrai : des hippies, des punks et le MEDEF qui se mettent sur la tronche sous la houlette malveillante des zombies… Il y a un petit côté « lutte des classes 3.0 » qui a effrayé la plupart des éditeurs démarchés. Pour eux, très peu de marge de manœuvre : le design était fait, les règles écrites… bref…. Délicat de changer quoi que ce soit. On se fait donc massivement retoquer à l’époque. Et pourtant, on se dit « c’est con : la mécanique tourne comme un coucou Suisse, on kiffe le jeu comme des marcassins dans un bain de boue…. On ne peut pas laisser les choses en l’état ».

Et là, en faisant le tour de bourricot, on fait principalement deux gros constats : au final, il y a peu d’éditeurs à prendre des thèmes un peu borderlines. On sent bien que le besoin de tunes fait que les discours / thèmes / mécaniques sont majoritairement lissés. 2eme point : l’immense majorité des produits du marché est fabriqué en Asie. Perso, d’un point de vue empreinte carbone… ça m’irrite.

Donc, on se décide de s’autoéditer. De prendre à rebrousse-poil toutes les tendances du secteur :
– Pas de thèmes lisses, mignon, gnagnan, commerciaux : on veut avant tout des choses qui nous fasse bien marrer sans s’imposer la moindre contrainte marketing. On accueille donc tout ceux qui sont rejetés par les autres pour des prétextes commerciaux.
– Tout le monde fabrique en Chine ? Très bien, nous on va le faire en Europe ou en France ! Non pas par patriotisme ou chauvinisme à la con, mais par pure démarche éco-responsable (tu sais, les circuits courts, tout ça tout ça).

Et si on fait un KS, on livre très, mais très très vite. Ras le bol d’attendre 16 mois des jeux. C’est juste une aberration de faire autant attendre ceux qui ont confiance en toi. Ca ne t’agace pas toi de devoir attendre 2 ans et demi les projets que tu as backé ?

Pourquoi Freaky 42 donc ? Tu l’auras déjà à moitié compris : on est tous des Geeks mais du genre un peu déviant, un peu barré. Puis, faut avouer que ça claque comme nom !

Par rapport à ton parcours personnel pourquoi avoir choisi de travailler précisément dans l’édition de jeux de société ?

En fait, pour la petite histoire, j’ai commencé à bosser dans le jeu de société très tôt. Je faisais les démos de Games Workshop aux Salons du Jeu de Réflexion (souvenirs souvenirs), même bossé en job d’été dans une de leur boutique ; j’ai édité du scénario de JdR dans Casus Belli et surtout on a monté les premières conventions de jeux de pas mal de grandes écoles (l’ENSTA, EPITA, Polytechnique…). Paf, ça t’en bouche un coin ça non ?!  Et ouaip, on a monté les Première rencontre roliste de l’X ! Bref… Cela fait plus de 30 ans que je maraude dans ces eaux ludiques plus ou moins troubles.

The Freaky 42, est-ce un seul homme derrière cette maison d’édition ou peut-on citer d’autres personnes ?

Pierre-Yves Bonnet. Oui oui, c’est lui !

Surtout pas un seul homme ! Tu te plantes si t’es seul ! Le groupe à pas mal évolué depuis le début. En ce moment, la « core team » est de 4 personnes : Le Fantastique Zariel aux Illus et Graphismes (enfin, tous les trucs juste trop classe que tu fais « ouaaaahhhh comment c’est beauuuuuu »), le Fabuleux Kevin en Ministre de la Propagande (il cherche aussi à monter un import/export de pizza à l’Ananas), l’Excellent Gabriel en tant qu’inépuisable « couteau multi fonction », bonne (et mauvaise) conscience de groupe, et garde-fou lorsque je m’emballe.

En plus, il y a Coralie qui s’occupe de gérer les traductions avec Val et des trucs hyper gavant genre les contrats, le juridique, et tout ça mais surtout qui me supporte au quotidien ; Jordan dont l’œil acéré et une pratique assidue du kung Fu aquatique lui permet de nous transformer/préparer toutes les règles ; Christophe qui veille sur le groupe comme le vieux tonton en bout de table qui va recadrer les p’tits cons quand ils partent en sucette avant la fin du repas. Valentin, le sniper du bon mot, l’arbalète de l’expression juste, le stagiaire de seconde, mais surtout le polyglotte de la team avec Coralie. Et ouaip… On est nombreux 😊

Quelle est la démarche d’édition choisie par The Freaky 42 et ton point de vue aux sujets des démarches non choisies ? Les options choisies, abandonnées ou jamais envisagées ? Le Kickstarter semble une démarche prioritaire pour The Freaky 42 pour chacun de ses jeux ? Pour quelles raisons ?

Premier point : pas de fabrication en dehors de l’Europe. Ce n’est pas même pas un point de discussion. En revanche, nous sommes complètement ouverts à une localisation à l’étranger à partir du moment où l’éditeur est sur la même longueur d’onde : « fabrication locale pour un bien être global ».

Le Kickstarter est, pour le moment, le seul moyen d’exister économiquement pour un micro éditeur tel que nous. Il permet d’absorber les frais fixes liés à un projet afin d’envisager sereinement la distribution sans mettre trop en péril la boite. Quand on s’ra grand, on se passera du KS mais pour le moment, c’est indispensable.

Et c’est avant tout de l’édition classique ? Y a-t-il de la coédition, de la localisation prévue, du PNP possible ?

Edition classique ? Nous sommes tout sauf classique mon ami !:) Quand nous embarquons un Auteur pour son jeu, on l’associe complétement à la démarche éditoriale : il rentre dans le team le temps du projet, et ce trip est tout sauf classique pour lui ! En fait, c’est un peu le trip des Freakys : viens qui veut en fonction de son temps, de ses compétences et envies.

Pour le reste, on est ouvert à tout : coédition, localisation. Faut juste que le projet nous plaise et réponde à nos marqueurs !:)

The Freaky 42 fait fabriquer par Victoria Game. Quels sont les choix de fabrication, les impératifs, les impondérables, les contraintes de fabrication à respecter ?

Notre seule « vraie » contrainte est de limiter au max notre empreinte carbone. Pour le moment, cela revient à travailler en circuit court sur des matériaux recyclés au maximum et limiter voir bannir le plastique de nos jeux. VG répond à cette attente et il y a une bonne connivence avec Guillaume (le patron de Victoria Game). Comme nous, il se développe et s’améliore avec le temps. Et retiens mes mots : VG va devenir un acteur majeur de la fabrication en France (mais ça, je te laisse voir cette partie de l’histoire avec lui 😉).

Donc une vraie démarche écoresponsable pour the Freaky 42 ? Y-a-t-il tout de même des choix faits à contre cœur ?

A contre cœur ? ahaha, non ! bien au contraire ! C’est le cœur même de notre démarche. Penser encore à notre époque « qu’un thermoformage, c’est bien ! » que « fabriquer en Chine, osef, ce n’est pas cher ! » que « la pollution d’un jeu ça va, ce n’est rien par rapport à une voiture », c’est un truc qui me fait gerber. Faut être sacrément con ou redoutablement aveugle pour ne pas avoir conscience des enjeux écologique de notre époque. Et ça se fait à tous les niveaux. Tous.

Que ce soit pour l’industrie du jeu, de la bouffe de l’automobile, de la tringle à rideaux. Le Think Global, Act Local reste vrai. En tout cas, nous on y tient et on y croit. Si, à notre niveau d’éditeur de jeu on ne le fait pas…. Qui le fera ?

Comment se font les choix des jeux à éditer ?

On teste. Si on se marre, c’est plutôt bon signe. Simple non ? Bon en vrai… Il faut que la mécanique nous plaise aussi et soit un chouia calibrée.

Et concrètement comment se fait le choix des auteurs et des illustrateurs ? Quelle relation The Freaky 42 a-t-il avec ces derniers ?

Auteurs et illustrateurs, quel que soient nos projets, sont inclus dans la team au moment où l’on démarre. Ils participent à la réflexion globale. On travaille un peu en mode ruche au début. Puis, on sépare les thèmes et les équipes afin de gagner en temps et efficacité. Et justement pour cette raison (une collaboration intense et bijective), il faut que le feeling passe très vite. Pour le reste, c’est un secret industriel. Si un magicien dévoile tous ses tours, il perd de son aura non ?

Pour donner un peu d’espoir aux acteurs professionnels du monde ludique, comment un auteur ou illustrateur de jeu s’y prend-il pour taper dans l’œil de The Freaky 42 ?

Nous payer un coup est une excellente porte d’entrée : nous sommes bassement influençables et hautement corruptibles !

Comment l’éditeur s’intègre-t-il globalement dans la conception des jeux qu’il édite ? A quelle étape joue—t-il le rôle le plus essentiel ?

Je ne sais pas si c’est l’éditeur qui a le rôle le plus essentiel : sans auteur, il n’y a pas de jeux, sans illustrateur, il n’y a pas de vie dans la mécanique, sans distributeur, il n’y a pas de vie dans les réseaux, sans boutiques il n’y a personne pour parler avec amour de notre jeu vers le joueur et sans joueur pour acheter et bien… tout ce que je viens de te dire, c’est juste du vent puisque cela ne sert strictement à rien. Quoi de plus horrible que de faire fabriquer un truc qui ne sert à rien et qui va pourrir sur une étagère car personne n’en veut ? Perte de temps, de ressources, de tout !

Bref, ce que je pense c’est que chaque acteur de la chaine est essentiel. Pour moi, le rôle de l’éditeur c’est de mettre en adéquation une offre (un jeu) avec une demande (le joueur). Puis organiser l’ensemble des acteurs autour d’un agenda, de livrables clairement définis, de dates dûment respectées et d’un cahier des charges identifié, reconnu et partagé. En tant qu’éditeur, tu dois contrôler en permanence l’ensemble des livrables que tu as identifiés en termes de couts, qualité et délais. Cela va du business plan, au planning, en passent par le proto, les devis, le contrôle des BAT, du dispatch etc…

Ah ! ça te fait tout bizarre tout d’un coup que je te parle sérieux hein ?! Tu croyais qu’on n’était qu’une bande de punks plus enivrés d’un groupe de bretons en festnoz ?! Qu’on y allait en mode YOLO et hop ! Et bah non, tu te mets le doigt dans l’œil jusqu’au coude mon pote. 😊 Sous des dehors de branleurs d’élite (la crème de la crème Monsieur), on est tous des professionnels dans nos différents corps de métiers d’origine. Que ce soit en gestion de projets, de risques et d’analyse financière, de direction artistique, de connaissance du droit etc… Au final, ça pourrait presque être notre devise : Travailler sérieusement sans jamais se prendre au sérieux. Tiens… J’aime bien ça…. Je vais voir à la replacer.

Donc, tout ça pour dire que quand t’es éditeur, t’as une montagne de taf à fournir. Je ne sais pas comment font ceux qui sont seul. Cela me parait surréaliste.

Petite note en passant : ce n’est pas parce qu’on ne vise pas une renta financière de ouf, qu’on laisse complétement la partie finance en désuétude. Bien au contraire ! Faut faire de sacrées claquettes pour être à l’équilibre !

Pierre-Yves, quel est ton rôle dans ce processus ?

Coordinateur de l’ensemble ? Ça me fait toujours marrer de lire « oui… je suis CIO de ma boite de … euh… 3 personnes », ou encore « directeur de la production artistique »…. Hep ! Vous êtes 2 pèlerins dans la boite, t’es juste directeur de… rien 😊. Non non, pas de titres débiles chez nous. On a nos domaines de prédilection et c’est tout 😊

Moi, c’est la préparation des plans, des plannings des tableaux financiers. L’apport des nouveaux projets et les idées absolument débiles qu’on ne fera jamais (bien que sur ce thème, on soit beaucoup dans l’équipe).

Chez The Freaky 42, combien de temps prend ou peut prendre en moyenne l’édition d’un jeu ?

Ça, c’est tout vu : 9 mois environ. (Marrant ça non ? le temps d’une grossesse). C’est nuançable cependant : pour le fantastique tarot halluciné, 2 mois car pas de mécaniques (mais par contre une formation intense et accélérée en psychologie & tarot de Marseille).

Parlons un peu des jeux édités par The Freaky 42 ? On peut notamment parler du jeu de cartes Zombie A-Social Club, grand gagnant du prix public Octogone Expert 2019 ? Les mécaniques, l’univers, l’illustration. Tout ce qui a fait son succès.

Tu as oublié les majuscules : GRAND GAGNANT du prix public « expert » Octogones. Ecoutes, je n’en reviens toujours pas. Et pourtant cela fait un an et demi. On savait que nous avions une mécanique inédite et intéressante, que les illustrations et la pression des zombies dans le jeu rendaient les parties immersives et l’expérience de gaming tendue (voir sexy ?). Mais de là à mettre à l’amende Villainious (la franchise de Mickey) et Requiem, le jeu magnifique avec les illustrations de Ledroit…  Bah bah bah…. Quel plaisir ! Une reconnaissance qui nous a fait dire qu’on était dans le vrai dans notre démarche.

Que le public de Lyon nous ait attribué cette distinction est, d’une part, la preuve que ce sont des gens de vraiment bon gout, et d’autres part, que cela sert d’envoyer des pots de vins aux organisateurs.

Zombie A Social Club est un jeu de cartes stratégique rapide pour 2 joueurs et plus sur une durée type de 30 minutes. Vous devrez faire preuve d’opportunité, de réflexion et être sans pitié pour vous imposer. Mais prenez garde ! Les zombies rodent et on ne pourra pas sauver tout le monde… Non… On ne pourra pas…

Il y a donc aussi le Fantastique Tarot Halluciné ? C’est quoi ça ?

Le Fantastique Tarot Halluciné du Fabuleux Professeur Zariel ? C’est un flash project, une campagne très courte montée pour Noël 2020. On voulait proposer un tarot de Marseille mettant en valeur les illustrations de dingue de Zariel. Fabrication française, top qualité, prix hyper abordable. Et le projet a rencontré un tel succès que l’on a décidé de le faire distribuer. Et ça fonctionne. En même temps, avoir un jeu de tarot aussi bien illustré avec un vrai trip à l’intérieur et tout ça pour 15 euros … L’idée cachée du projet était de montrer qu’on peut faire de beaux jeux de cartes, fabriqué en France en minimisant notre empreinte carbone et avec un prix vraiment abordable.

Il a voyagé pour vous entre les mondes et les plans, il a vu le futur, le passé, et de temps en temps, le présent ! Et comme le Dr. Zariel est vraiment fabuleux, il vous offre la vision de ses temps multiples afin de vous y préparer au mieux.Ce fantastique tarot vous procurera non pas une, non pas deux, mais une infinité de façons de l’exploiter !

Vous en servir de tarot classique pour voir les mirettes ébahies de vos compagnons, lire l’avenir de Tata Suzanne ou connaître les bons numéros du loto de la semaine dernière, ou encore des shurikens Suisses extrêmement classieux. Voire des marques-pages laissant votre livre à l’état de simple faire-valoir.

J’ai surtout entendu parlé de The Freaky 42 avec le jeu Crazy Farmers and the Clôtures électriques sorti l’an dernier. Comment en est-on arrivé à aboutir à ce jeu un peu déjanté, très second degré ? Peux-tu nous parler de ce projet un peu rock’n roll ?

Crazy Farmers… Un gros projet. Notre premier (très, trop ?) gros projet. Quentin et Jeremy sont venus nous proposer leur jeu et nous avons tout de suite accroché à la mécanique. Puis le thème nous permettait d’aborder, de façon un peu déguisée et détournée la condition du monde agricole. Tout le monde leur tape dessus et les exploite en s’en cognant de savoir s’ils survivent ou pas. Nos fermiers (ou assimilés) galèrent de plus en plus pour vivre.

Là, dans le jeu, ils pètent les plombs sous la pression et se transforment en gladiateurs. Ils pimpent leurs tracteurs façon Mad Max et montent une compétition de pose de clôture électrique. La TV poubelle adore et les voilà promus hyper star, payés plus cher que des champions de foot. L’agriculture sauvée par la TV poubelle, c’est tellement absurde que c’est drôle. Et, nous l’espérons, que cela amène à réfléchir un tout petit peu.

C’est un jeu avec une pincée de « prends ça » et de manœuvres impitoyables, où vous aurez l’occasion d’expérimenter l’Ultimate Farming Championship. En 2042, l’Union européenne a supprimé depuis longtemps l’aide financière aux agriculteurs. Afin de se sortir de cette situation, les agriculteurs ont créé un concours pour l’installation de clôtures électriques, qui a très vite attiré l’attention du public et des sponsors.

Pendant votre tour, déplacez votre tracteur le long des chemins. Placez les clôtures électriques derrière vous. Dès que vous entourez un terrain avec vos clôtures, prenez-en le contrôle. Dès que vous contrôlez un certain nombre de parcelles (en fonction du nombre de joueurs), vous remportez la partie. Cependant, ce ne sera pas aussi simple. Vous devrez être à l’affût, car vos adversaires tenteront de vous arrêter en coupant vos clôtures électriques ou en jouant des cartes d’événements…

L’actualité de The Freaky 42 c’est le KS : Gare aux Relous. On veut tout savoir sur ce jeu d’ambiance où les Relous de fin de soirée seront de la partie.

Pour sûr ! Gare Aux Relous te donne les ficelles pour te débarrasser de tous les Relous en soirée. On a tous connu ça : t’as envie de passer un bon moment, tu t’ambiances tranquillement dans la résoi et là pim ! T’as un relou qui commence à te coller. Le mec qui te parle de trop près et qui a une haleine de poney mort, la nana, comme Amma, qui parle tout le temps de ses enfants ou de son chat et qui te montre les 142 photos, le mec qui ne sait pas gérer l’alcool et qui est malade au bout d’une heure, la nana qui ne sait pas chanter et qui se croit à The Voice malgré tout…. Il y en a pagaille !

Ton objectif dans GaR va être de refiler les Relous aux autres en tchatchant (c’est une phase d’enchère toute simple). Tu réussis : tu fais briller ton swag et gagne des points. Tu te plantes : le relou te colle pendant la soirée et tu n’as d’autres choix que ramasser ton seum (et donc prendre des points négatifs).

Tu vas me dire : « t’es gentils mon biquet mais à part le thème vaguement original (mais toutefois magnifiquement illustré) la mécanique…. Bon… Z’avez pas réinventé le fil à couper le beurre ». Sauf que toute la subtilité du système, l’originalité de la mécanique que Franz Couderc l’auteur du jeu a élaborée c’est que tu vas pouvoir « cibler » un joueur autour de la table. Tu as 3 valeurs d’enchères et si une majorité d’enchères d’un certain type sort, tu sais que le relou va être balancé à droite, à gauche ou même aller plus loin. Tu peux donc essayer de t’accorder avec tes « camarades » pour viser quelqu’un et donc deviner la valeur totale des cartes tchatches.

Ça te semble un peu obscur comme ça ? Mouais… J’avoue que ce n’est pas bien clair quand je me relis. Dis-toi juste que le jeu est suffisamment simple pour qu’un gamin de 7 ans y joue et suffisamment malin pour que des gamers avertis se bidonnent. Le jeu s’explique en 4 min montre en main. A peine le temps de faire un cocktail ou d’aller chercher une bière dans le frigo.

Je t’ai parlé de Franz Couderc un peu ? Non ? Ah bah attend, je vais t’en toucher 2 mots ! Il est venu nous trouver avec la mécanique de GaR. Le jeu était habillé différemment avant et franchement, ça ne nous plaisait vraiment pas. On lui a proposé le thème. On a pimpé très légèrement les mécaniques avec son accord et on a fait tout l’habillage et maintenant, Franz est un auteur heureux et nous sommes des éditeurs comblés. En vrai, je suis ultra fier du taf qu’on a tous réalisé dessus !

Rendez-vous le 28 Avril sur KS et on vous promet une campagne rapide, efficace et de recevoir le jeu en Septembre max ! C’est ici pour ne par rater le début : https://www.kickstarter.com/projects/1486112993/gare-aux-relous

Y a -t-il des projets à plus long termes qui tiennent à cœur dans le long terme à The Freaky 42 ?

Oh oui ! Très rapidement va sortir (juste après GaR), la « Coupe Du Monde De Pogo ». Encore un party game mais a la mécanique plus légère encore ; mais là, la grande force du jeu et j’y tiens particulièrement, cela va être l’ambiance.  On est tous frustré de ne plus pouvoir aller en concert, de voir que tous les festivals de musique s’annulent, de ne plus ressentir le kif d’un partage de musique. Sous l’impulsion de Guerilla Asso, on va monter un « Faustival » qui va réunir beaucoup, mais vraiment beaucoup de groupes de la scène alternative française (et d’ailleurs). Des groupes dont la passion première n’a jamais été de gagner des tunes mais de partager une émotion, un message avec le public et qui ne peuvent plus y parvenir depuis la crise sanitaire. Ils seront présents dans le jeu ! Sous la houlette de Guerilla Asso et de Till, au moins une vingtaine de groupes a déjà rejoint le projet. Les cartes auront un design inédit dans le milieu du jeu, Zariel (encore une fois) a eu une idée que je trouve absolument géniale, et on a hâte de vous la partager.

L’objectif est non pas de te faire vivre un concert, ce serait très présomptueux de notre part, mais de t’approcher de cette ambiance chaude et un peu folle des festoches de musique. Le thème est récupéré d’un morceau de Poésie0, c’est complètement absurde et tellement drôle. Ce devrait sortir en début Juin !

Et ensuite ahhhh…. Mais là, il y a le Grand Œuvre des Freakys ! bon… Je te l’accorde « G.O.F. », ce n’est pas top comme acronyme… On va travailler le truc.

On va essayer de faire une trilogie autour des rats. Sur 3 jeux, raconter une histoire et faire progresser les joueurs en matière de gameplay. On va faire d’abord un party game, ensuite un jeu « famille » et enfin, terminer sur l’expert. Chaque jeu pourra être pris indépendamment, et si un joueur fait la trilogie, il pourra découvrir l’histoire de nos rats dans sa globalité et passer à des jeux de plus en plus trapus. J’espère que ce projet va porter ses fruits. On a déjà le premier Rats, le second est couché sur le papier mais nécessite encore pas mal de taf et le 3eme…. Je refuse pour le moment de l’attaquer autrement qu’en brainstorm pour ne pas parasiter les 2 autres. Mais si ça le fait et que ceux qui nous suivent accrochent à l’idée…. Franchement, on pourra être fier et heureux !

Et puis… d’autres surprises…. Bien sûr !

Mais au fait, comment The Freaky 42 se fait-il le mieux connaître ?

Notre page facebook https://www.facebook.com/TheFreaky42/ est assez active (NDLR : avec ces 1100 abonnés) grâce aux idées lumineuses de Kevin ! Sinon eh bien… on galère, comme tous les petits éditeurs. Le truc, c’est qu’avant, notre premier vecteur de communication s’était les salons. Bon sang, qu’est-ce que j’aime les festoches : tu parles directement aux gens, tu partages un moment, un jeu, un verre, des idées !  Un vrai kif. J’ai beau dire que je déteste les gens, en vrai, c’est juste pour me la raconter.  Au fond de moi, j’adore les rapports sociaux, je prends un vrai plaisir à rencontrer le monde. Or là, comme on le sait tous, c’est compliqué depuis 1 ans donc…. Et bien…. On rame et on essaie de ne pas sombrer dans l’oubli.

On a la chance d’avoir quelques amis reviewers bien sûr ! Ils nous donnent de temps en temps un peu de visibilité sur nos projets mais c’est souvent maigre. Et c’est bien normal : il y a tellement de jeux qui sortent, tellement d’éditeurs…. En vrai, je comprends qu’ils ne puissent pas passer des masses d’heures à parler d’un petit éditeur. Le seul truc qui me titille, c’est quand le temps est abusivement trusté par les gros. Avoir une 142eme revue sur le blockbuster kilo-plastique du moment…. Ça me laisse toujours un peu songeur. Mais bon.

Y a -t-il des pistes de plus en plus abandonnées pour un éditeur comme The Freaky 42 et d’autres qui sont de plus en plus envisagées ?

On est ouverts à tout Monsieur ! On tapine ! On racole ! On prend TOUT ! Enfin, en matière de communication. 😊

Pour le reste…. La fabrication, je pense qu’on a été assez clair. France si possible, Europe au Max, le reste…. Même pas la peine d’y réfléchir. En revanche, une piste qu’on voudrait exploiter est celle de trouver des éditeurs étrangers, sur d’autres continent pour qu’on localise leurs jeux en matière d’Edition et de production et vice-versa. Une démarche un chouia plus écoresponsable en somme 😉 Enfin, sur le contenu, prendre des thèmes commerciaux et aseptisés n’a jamais été notre passion et donc on ne l’envisage pas.

Indépendants nous sommes.

Certains jeux de The Freaky 42 sont distribués par Ludistri ? Quelles sont les avantages et les contraintes d’un circuit de distribution utilisé par The Freaky 42 ?

Ludistri nous distribue pour le Tarot halluciné et Gare Aux Relous (et surement sur la coupe du monde de pogo et Rats). Notre collaboration est toute récente mais déjà très agréable. Pas de blabla inutile. Droit à l’essentiel. J’aime ! Benjamin est un mec en or, Emmanuel et Julien sont aussi des mecs très (mais très) pro et très agréables. Avant de partir bille en tête sur un jeu, on essaie désormais d’échanger avec le distributeur pour voir si le concept lui plait et si le jeu a sa chance en rayon. Cela nous permet de calibrer la charge (et le tirage) en avance de phase, ce qui est un vrai plus pour le montage du business plan. A nouveau, sur une petite structure, on ne peut pas se permettre de se gaufrer. On n’a pas la trésorerie suffisante pour ça. Chaque projet est « quitte ou double ». Et en l’occurrence c’est « quitte ou survit pour un try supplémentaire ». Donc avoir la team de Ludistri pour rassurer sur la pérennité de certains de nos projets, c’est vraiment top, cela nous donne confiance aussi, dans la lignée du prix octogones, ose dit qu’on est toujours un peu dans le vrai sur le chemin que nous avons choisi.

D’une manière générale, depuis ses débuts, quelles ont été les principales difficultés rencontrées pour The Freaky42 ?

Pour nous c’est le manque de notoriété et le prix prohibitif des stands sur les grands salons. Ensuite, cela a été de trouver un vrai modèle économique. Trouver le point idéal ou l’on ne perd pas d’argent, on rémunère aussi bien que possible les acteurs et surtout que les joueurs soient heureux (qu’ils se disent qu’ils en « ont pour leur argent »). Le tout en gardant notre identité, nos principes et notre indépendance. Ça, je peux te dire que c’est un vrai travail de funambule. Les sirènes de la prod à l’étranger ne cessent de sonner, la facilité du plastique, les thèmes culcul la praline mais qui font du cash font le siège de nos mails… Mais on résiste. Voir même, cela renforce notre détermination.

Autre difficulté, la multiplicité des sujets et la nécessité d’avoir un éventail de compétence pléthorique. On se pensait aiguisés et affutés après (en fonction de chacun) entre 10 et 20 ans de solides années de gestion de projets. Ahahahahaha ! Quelle blague ! Des newbies finis oui ! Belle leçon d’humilité ! Il faut avoir des compétences de graphiste (ou, a minima, un œil avisé), de (sur)communiquant, de démonstrateur, d’élocution, d’écriture, savoir comment on fabrique, sur quels matos, comment et pourquoi pour faire les bons choix, avoir un carnet d’adresse de ouf, des idées de mécaniques qui déchirent, des illustrateurs avec du caractère et un vrai style, avoir des compétences web, des connaissances en logistique, en juridique pour les contrats et différentes règles sur les produits que tu sors…. Ahahah…. Et j’en oublie masses ! En gros, si t’es en team ultra réduite et que tu as la fatuité de croire tout savoir et pouvoir tout improviser…. Tu vas surement te planter, ramer et t’es partis pour avoir de vraies désillusions.

Ne jamais oublier les 5P : « Proper Preparation Prevents Poor Performance »

Comment vois-tu l’évolution du marché de l’édition du jeu ?

Délicat. Notre secteur se structure à marche forcée depuis quelques mois. Beaucoup de regroupement / rachats. Ce qui est normal. Tu vois les linéaires des Cultura ou Fnac augmenter chaque année, c’est un marché encore méconnu du grand public mais qui ne cesse de s’étendre. Le jour ou le JdS moderne sortira officiellement de sa niche, il y aura une explosion de la demande. Mais pour ça, il faut encore changer cette image de « c’est trop compliqué pour moi, je ne sais pas lequel choisir » qui se termine souvent par un « tiens, je vais prendre un monopoly-qui-rassure ».

Beaucoup de sorties tous les mois noient l’offre. Les boutiques ont tendance à se réfugier sur des produits ou il y a eu de la com’ et qu’ils sont sûr d’écouler (et c’est bien normal : ils achètent les jeux et immobilisent leurs stocks et trésorerie tant qu’ils ne sont pas vendus…. C’est compliqué pour eux !)

Beaucoup d’éditeurs, avec les nouvelles taxes d’export Chinoises ont décidé de rapatrier leurs productions en Europe ou en France. Moralité : les usines en Europe croulent sous la demande. Elles prennent plus difficilement des petites séries avec un délai de réalisation de dingue. 2 exemples : Trefl ne prend plus désormais que 3000 unités minimum, Ludofact, en Janvier avait leur calendrier de production complet jusqu’en Octobre… Pour les maisons d’éditions plus humbles, cela devient vraiment compliqué.

En résumé : structuration des gros qui va laisser peu de place aux petits, offre pléthorique qui t’oblige à surcommuniquer sur tes références, usines engorgées qui répondent à la plus grande demande… En étant petit, il va falloir être très malin pour continuer sur le même modèle ! Et tu sais quoi, ça nous challenge ce contexte ! Ca nous oblige à nous remuer le cul !

Sur ce sujet, tu sais… On dit (comme des centaines de boites) : « oui, euh… nous on a fondé un truc parce qu’on voulait faire la différence, parce que tu vois euh, nous on est hachements meilleurs et que nous on a la vérité et pas les autres » ou encore « Nous c’est comme les autres mais en pas pareil avec une originalité qu’on a la prétention d’avoir en mieux que les 1000 autres ».  Tu vois ? Tous ces poncifs et vacuités qui sont dans la description de centaines d’éditeurs qui se croient sortis de la cuisse de Jupiter et dont les égos gonflent comme des ballons de baudruche ? Ça rappelle Ecclésiaste : « vanité des vanités, tout est vanité » !

 Oh ne te méprends pas ! Nous avons eu le même discours ! Et on le tient encore si tu relis le début de cet échange ! Mais maintenant… Dans ce nouveau contexte… C’est là où l’on va voir qui est vraiment original ou pas… au-delà des simples effets d’annonces et des mots. Qui est pérenne… ou pas. Je pense effectivement que le vrai challenge arrive dans les mois à venir. Si tu n’es pas suffisamment original et attractif pour briller, ta boite va s’éclipser dans l’ombre des géants.

Pour conclure, qu’est-ce qui selon toi fait l’originalité d’un éditeur comme The Freaky 42 ? Une question qui tombe bien non ?

Ahahah, parfait ! Juste après mon laïus sur la vanité des éditeurs qui se croient tous plus originaux les uns que les autres (mais sans qu’ils ne disent jamais le pourquoi du comment ! 🙂

Je ne sais pas trop comment te répondre pour être honnête. Te dire que l’on édite que ce qui nous parait avoir du sens et non seulement trop vague mais aussi manque d’originalité. Je ne vois pas un éditeur lancer un projet qui pour lui n’a pas de sens (?). Te dire qu’on se kiffe tous (pour de vrai) manque aussi d’originalité : si t’aime pas avec qui tu bosses…. Change vite !

Peut-être… Notre indépendance ? La liberté du ton qu’on emploie ? Le fait de concilier des pointures dans certains domaines professionnels avec des réunions qui sentent bon la cour d’école (de primaire) ? De savoir qu’on n’est peut-être pas les meilleurs mais qu’on le fait avec gourmandise ? De se dire que malgré les pédigrées de chacun des Freakys, nous avons tous, tout le temps, beaucoup à apprendre ? Que si on a l’humilité de connaître notre place dans le milieu ludique, nous avons aussi la prétention de défendre farouchement notre projet et nos valeurs ?

Voila. Surement un peu de tout ça.

https://www.facebook.com/TheFreaky42/

Propos recueillis par Laurent.

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