[Test] Crime Zoom. Oiseau de Malheur, Un Ecrivain mortel, No Furs. 3 enquêtes pour vous révéler fin limier
1-6 joueurs | Stéphane Anquetil | ||
14 ou 16 ans et + selon l’enquête | Dess, Goliat Gashi, Julien Long, Leejun35 | ||
60 minutes | Aurora | ||
Déduction, enquête | Enquêtes | ||
12,90 € chez mais en rupture pour le moment | et dans |
Un meurtre a été perpétré, découvrez ensemble l’auteur des méfaits.
Sherlock Holmes Détective Conseil a fêté ses … 40 ans, eh oui, c’est aux Etats-Unis, en 1981 qu’il sort un peu en catimini, puis distribué en 1985 par les jeux Descartres. Remis au goût du jour en 2011 par Ystari Games puis développé depuis 2014 par Space Cowboy. On peut dire d’une manière générale que le renouveau du concept des jeux d’enquête est plutôt récent. Tous partagent les éléments typiques de cette catégorie, qui font leur succès : parfois solo, ils sont tous coopératifs puisqu’il faut trouver ensemble l’auteur du crime (à la différence d’un Watson & Holmes), et demandent logique, réflexion et donc déduction, le tout se faisant au travers d’un scénario immersif. Attention on ne parle pas des jeux à énigmes du type Unlock. Le point commun qui est le plus sujet à caution dans un monde ou frénésie de jeu et développement durable ne font pas souvent bon ménage, c’est leur caractère one shot : une fois l’enquête résolue, vous ne pourrez plus y rejouer, à moins d’avoir une mémoire de poisson rouge. C’est ce que leur reprochent leurs détracteurs, mais c’est un peu comme un roman ou un film car l’aspect narratif y est souvent primordial.
Crime Zoom. Des enquêtes pour fins limiers.
Dans Crime Zoom, les joueurs partent d’une grande scène de crime plus ou moins grande. Cette image est formée par une frise de cartes (jusqu’à 15 cartes selon l’enquête) qu’ils retournent pour collecter des indices, suivre une piste ou obtenir plus de détails. Le scénario, narratif, est conçu comme une arborescence à partir des cartes de départ, avec différentes pistes … et fausses pistes. Le but du jeu est de répondre aux questions sur l’affaire en ayant pris ou retourné le moins de carte possible. Mais attention, si vous vous trompez de coupable, vous avez certes perdu, mais gagné le droit de découvrir l’histoire et la solution. Si vous avez trouvé le coupable, d’autres éléments vous seront demandé qui vous feront augmenter votre niveau de réussite.
Crime Zoom édité chez Aurora (vous voulez en savoir plus sur cet éditeur, l’article sur Undécent est là) est un jeu de Stéphane Anquetil. Vous ne le connaissez peut-être pas mais c’est un expert du jeu d’enquêtes ou d’escape games. Il a entre autres sévi pour les Escape Box de 404 On Board (Detective, Rick et Morty, Minecraft …), pour des livre-jeux (Vivez l’Aventure : Excalibur), pour une enquête de 2013 de Sherlock Détective Conseil et pour des scénarios de Chronicle of Crimes Noir. Avec Crime Zoom on surfe sur la même vague avec des enquêtes que l’on peut mener solo ou à plusieurs, à base de 55 cartes format poker dans des univers fondés sur des scénarios de polars plus ou moins noirs et aux thématiques plutôt variées (nouvelles technologies, affaire sulfureuse, règlement de comptes …). Les règles sont très simples, limpides, d’une grande accessibilité pour un temps de jeu tout à fait cohérent pour ce type de jeu (rarement plus d’une heure en moyenne). On explore, on suit une piste, puis une autre pour cheminer progressivement dans une enquête assez ouverte, où rien n’est bloquant et où vous récolterez les indices les uns après les autres.
Qu’est ce qu’on trouve dans la boîte ?
- 1 livret de règles
- 55 cartes
Comment on joue à Crime Zoom ?
Mise en place
On prend la carte 0 intitulée Mise en place et on suit les instructions. On installe la scène principale en respectant le schéma. Les cartes ne sont pas forcément numérotées. On place ensuite les cartes restantes en tas pour former la pioche des pistes. On retourne la carte pour découvrir l’enquête. C’est maintenant à vous d’enquêter.
On peut suivre un petit tuto dans le livre de règle qui précise ce que l’on peut faire avec les cartes (suivre les pistes, déployer les scènes). En voici la teneur :
Tour de Jeu
Il n’y a pas de tour de jeu. Les joueurs discutent entre eux pour décider des actions à entreprendre. Ils cherchent à résoudre ensemble l’enquête. La scène principale est le point de départ de l’enquête. Chaque carte vous apporte des indices. Vous pouvez à tout moment prendre une carte sans la retourner pour la regarder de plus près. Vous pouvez à tout moment retourner une carte pour en dévoiler les indices.
Un papier pourra révéler une adresse, une tâche pourra mener à une analyse et une clé pourra ouvrir un coffre. Il vous reviendra de choisir quand et quelles pistes suivre.
Une piste devient disponible dès qu’une carte y fait référence. Dans ce cas, un logo numéroté et un texte qui précise l’action correspondante se trouvent en bas de celle-ci (exemple : consulter telle ou telle carte). Si vous souhaitez suivre une piste, prenez simplement cette carte dans la pioche des pistes. Vous pouvez le faire à tout moment. Vous n’êtes pas obligé de le faire au moment où une piste devient disponible.
Il existe 2 types de pistes : une information ou une scène secondaire.
Piste conditionnelle. Certaines pistes ne sont accessibles qu’à condition de disposer d’un objet qui est représenté dans un polaroïd. Il est identifié par un numéro et une description.
- Une information : Les cartes Information ont toutes le même dos de carte. La seule différence est un numéro qui permet de piocher la bonne piste. Une fois piochée, une telle carte doit être retournée pour révéler les informations de l’enquête.
- Une scène secondaire fonctionne comme la scène principale. Le dos des cartes représente une illustration découpée sur plusieurs cartes.
Fin de l’enquête
Comme dans une véritable enquête, vous pouvez vous arrêtez dès que vous pensez avoir trouvé le coupable. Pour le prouver, il vous faut identifier le mobile et trouver l’arme du crime. Selon les enquêtes, il peut être utile de savoir où arrêter le coupable.
Les joueurs qui veulent aller à l’essentiel peuvent s’arrêter là. Les cartes qui n’ont pas été consultées offrent un bonus de points. Ainsi, moins vous retournez de cartes, meilleur sera votre score. A la condition, toutefois, d’avoir répondu correctement aux premières questions.
Si certains jeux d’enquête poussent aux suppositions, Crime Zoom exige des éléments concrets. Ainsi, certaines questions vous demandent de faire référence à des numéros de carte. En plus des questions principales, des questions subsidiaires viennent récompenser les joueurs plus curieux qui ne sauraient s’arrêter à la découverte du coupable. Ainsi, vous pouvez montrer jusqu’où vous avez compris la trame de l’histoire. Ceci vient compenser les points perdus en retournant plus de cartes.
En fonction de votre profil de joueur, décidez quand vous arrêter. Prenez ensuite le livret de règles à la page des questions pour y répondre. Ne vérifiez les réponses qu’après avoir répondu à toutes les questions.
Voilà. A vous d’enquêter.
Est-ce que c’est bien ?
Ce que j’ai ❤️
- La narration impeccable, captivante, avec du style.
- Un grand degré de profondeur, je ne m’y attendais pas vu le format de la boîte.
- On parvient à retracer l’histoire et à bien identifier les tenants, les aboutissants et les différents intervenants.
- Aucune incohérence ou approximation durant les 3 enquêtes.
- Apprécier une boite vous assure d’aimer les autres !
- La simplicité de la règle.
- Pas de scoring inutile.
Ce que j’ai 💔
- C’est le propre de toutes les enquêtes, à l’instar d’un Unlock, une fois joué, il est difficilement rejouable si ce n’est plusieurs années après … à condition d’avoir la mémoire courte ! Mais rien n’empêche de le prêter et le faire découvrir à vos amis qui eux, prendront une autre histoire, qu’ils vous prêteront aussi 😉
- Si on ne veut pas s’immerger, l’expérience de jeu fera flop.
- Comme tout jeu d’enquête avec des cartes, à 5-6 joueurs cela devient compliqué pour rendre visible tous les éléments de l’enquête pour tous ceux qui sont autour de la table.
Design
Le design est très sobre. Les illustrations sont soignées. Un Ecrivain mortel, hommage à Agatha Christie, est superbement illustré par Julie Dessertine. Un Oiseau de Malheur, illustré par Goliat Gashi, nous dépeint un univers parisien, plus froid, mais qui mets bien en évidence tous les détails de l’enquête. No Furs est abondamment illustré. Etant plus sulfureux, Julien Long et Leejun35 se sont amusés à nous dessiner – sans trop en révéler tout de même – certains travers sexuels de notre société.
Qualité du matériel
Vous ne serez pas forcément ébahis par le matériel qui n’est pas innovant. 55 cartes format poker de 63 x 88 mm. C’est tout. Et c’est suffisant ! Et pas d’utilisation d’appli, de livret complémentaire, ni besoin de faire appel à Internet. Les scénarios tirent toutes les ficelles du bon vieux polar classique. Si vous êtes accroc au croisement d’indices, à la déduction, vous passerez un chouette moment. Sinon les cartes sont de bonne qualité.
Thème
La première enquête sortie – Sa dernière Carte – était un beau galop d’essai réussi, avec surement ses petits défauts. D’une manière générale, les sujets et atmosphères choisis sont variés.
La seconde enquête Un oiseau de malheur est plus contemporain, avec plus de scènes, un aspect lié aux technologies et une enquête légèrement plus longue.
Paris, 2018, le matin. Un immeuble de bureau. Une frêle jeune femme retrouvée étendue sur le sol. Qui l’a tuée ? Pourquoi ? Vie privée ? Vie professionnelle ? Par où commencer ? Une enquête à rebondissement dans un Paris moderne et glacé
Un écrivain mortel est très atmosphérique, façon roman anglais d’avant-guerre.
1929. Un manoir, la nuit. Sir Knox a disparu avant la réception qui devait célébrer son dernier roman policier. Explorez les pièces. Interrogez les domestiques et familiers de la maison. Mais attention aux fausses pistes, l’auteur est malicieux. Alors, crime ou supercherie ? Un hommage à Agatha Christie.
No Furs a un sujet plus sulfureux, avec un retour à une forme très classique. En fait les enquêtes ont des tons et des styles graphiques assez différents.
2019, Londres, quartier « chaud » de Soho. Une garçonnière cossue. Un homme attaché et tondu. « No Furs » taillé sur son torse épilé. Une histoire adulte et épicée dans l’univers feutré des escorts et du luxe. Une enquête plus « Irène Adler » que « Sherlock ».
Mécanique
La mécanique est là pour mettre en avant le côté narratif et cela fonctionne plutôt bien ; seul bémol évidemment, il faut que les joueurs soient un minimum impliqués. Il faut s’immerger, s’employer à retenir les éléments les uns après les autres (de toute façon, un papier et un crayon peuvent vous aider en cela si vous le souhaitez). Mais c’est impressionnant : partant d’une seule scène recomposée à partir de quelques cartes rassemblées on va progressivement la compléter d’indices, et reconstruire un scénario d’une grande richesse et peut-être dénouer l’intrigue du crime que vous venez découvrir. Ça marche très bien!
Durant la partie, on peut décider d’arrêter l’enquête quand on pense avoir récolté toutes les infos nécessaires pour répondre aux questions.
Que dire des scénarios ? Le récit est bien mené, les embranchements logiques, les fausses pistes ne sont pas punitives et ça c’est bien, et elles ne sont pas trop importantes en nombre ce qui amène un certain réalisme appréciable. Vous irez forcément au bout de l’enquête, reste à savoir si vous avez le nom du meurtrier, le mobile du crime, les circonstances du crime etc … Autant d’éléments qui vous feront gagner des étoiles, donc montrer votre réussite qui peut s’avérer toute relative. De toute façon, on vous explique tout à la fin du livret.
L’installation est faite pour rentrer de suite dans l’histoire, la lecture du petit livret de règles n’est presque pas indispensable, peut-être juste pour savoir qu’il y aura à la fin un décompte de points liés à la plus ou moins bonne résolution de votre affaire criminelle. On est vite à l’aise et le matériel, même si ce ne sont que des cartes, invite à jouer.
L’absence de réel barème de réussite venant accompagner vos conclusions peut un peu désarçonner. Mais la couleur est affichée par l’auteur : pas de score pas d’aspect compétitif de toute façon est-ce que ça intéresse les joueurs d’enquête ? Je pense que non. Le fait de se voir attribuer des étoiles pour certaines réponses et pour les cartes non utilisées est déjà une bonne chose et cela permet de voir si vous avez les compétences d’un fin limier. Le but est de vous faire découvrir le fin mot de l’histoire et l’optimisation n’est donc pas une obligation ; il faut juste s’immerger pleinement et se laisser transporter dans ces histoires de crimes. Vous pouvez vous amuser à vraiment tout explorer, passant d’un indice à l’autre, ou tenter d’être bien efficace afin de ne pas révéler toutes les cartes puisque moins de cartes vous révélez, plus de points vous ferez.
Mise en place / Rangement
Une règle qui s’explique en 2 minutes. On prends la première page et on se laisse enbarquer. Les cartes sont classées dans l’ordre de numérotation pour plus de facilité. Lorsque vous le ranger, pour en faire profiter quelque’un autre, faites de même !
Conclusion
Stéphane Anquetil nous livre avec les Crime Zoom des jeux d’enquête bâtis sur des scénarios solides, des illustrations réussies à mi-chemin entre dessin et photos d’enquête, une mécanique sobre et efficace. La gamme Crime Zoom est une vrai bonne surprise dans l’afflux actuel de jeux d’enquêtes.
En fait on observe et on décide de retourner telle ou telle carte. Ce faisant, on glane des informations plus ou moins importantes et précieuses sur ce qui s’est réellement passé. Puis on accède à plus d’informations encore avec interrogatoires, dossiers d’empreintes, fouilles et autres analyses. On relie les informations entre elles et une ligne directrice s’installe tout doucement, laissant des points plus obscurs. Et quand vous pensez avoir tout trouvé ou pensez pouvoir retracer les événements, vous vérifiez votre enquête avec le livret de règles, en répondant à plusieurs questions. Toute bonne réponse rapporte des étoiles.
Oiseau de Malheur séduit grâce à son scénario bien ficelé et surtout cohérent et crédible. Il n’est pas capilotracté, mais réaliste et accessible. On reconstitue bien ce puzzle qui nous oblige à assembler tous les éléments d’une manière logique dans notre quête de la vérité et on arrive plutôt assez bien à ses fins et à trouver les vrais coupables. C’est gratifiant tout de même.
Dans Un Ecrivain mortel, votre enquête policière vous emmène dans les salles et les couloirs d’un manoir où l’organisateur d’une soirée mondaine a mystérieusement disparu. C’est délicieux et captivant. Le style oldschool complétant à ravir les autres enquêtes.
Dans No Furs, l’enquête n’est pas très difficile mais très captivante. La scène principale étant très conséquente (comme dans Sa Dernière carte), on adore farfouiller les moindre recoins à la recherche d’indices. Des rebondissements permettent de rester en haleine et plus on avance, plus on a envie d’en savoir plus.
Des enquêtes que l’on peut faire à son rythme, à emmener facilement, tenant dans un tout petit format et qui offre à chaque fois l’équivalent d’une heure de jeu captivante. Alors, prêts à relever les défis, fins limiers ?
Testeurs : Laurent, Sandrine