[Entretien avec] Bruno Faidutti

Aujourd’hui, j’ai l’immense honneur d’interviewer Bruno Faidutti, auteur prolifique de, notamment, Gold River chez Lumberjacks, Poisons chez Ankama, Queen’s Necklace chez Cool Mini Or Not, Vampire the Mascarade: Vendetta, chez Horrible Guild, mais encore Vabanque chez Igari, Vintage chez Matagot, Menestrels chez Sweet Games, Citadelles chez Edge ( pour sa 4ième édition ), Mascarade chez Repos Prod, et bien d’autres! 

Bonjour Bruno, un grand merci pour l’honneur que tu me fais en répondant à mes questions! Tu es l’auteur du premier jeu que j’ai acheté, Citadelles 1ère édition, il y a maintenant quelques années ( en 2000 je crois? ). Aussi cette interview a une résonnance toute particulière pour moi!

Tu as un parcours riche, peux tu nous le décrire? Comment en es tu venu à créer des jeux de société?

Je ne sais pas bien ce que tu entends par “un parcours riche”. Professionnellement, j’ai d’abord étudié l’économie, passé l’agrégation de sciences sociales, et je me suis retrouvé prof de lycée. Puis j’ai eu envie de reprendre les études, en histoire, et ai fini par faire une thèse sur l’image de la licorne, et le débat sur sa réalité, du Moyen Âge au XIXème siècle, donc une grande fresque quand la mode est plutôt aux sujets pointus et limités dans le temps.

En parcourant ta page Facebook, j’ai pu constater que tu t’intéresses beaucoup aux animaux fantastiques ( les licornes en particulier ), pourquoi cette fascination? 

Je viens d’en parler. Je n’ai pas du tout de fascination pour les licornes, j’ai une fascination pour l’histoire des sciences, et en particulier pour la manière dont les hommes se sont rendu compte qu’ils se trompaient. Mon travail sur les licornes montre surtout comment on a commencé à se poser la question de leur existence, avant de finalement répondre par la négative.
Mais du coup, je dois être aujourd’hui la personne au monde qui en sait le plus sur les licornes, et c’est rigolo. Donc je m’amuse, je continue à faire quelques recherches, et je profite du confinement pour essayer d’écrire un bouquin rigolo à ce sujet.

Ton doctorat en Histoire et ton Agrégation en Sciences Sociales te servent-ils pour créer tes jeux?

Non, et c’est très bien comme ça. Je tiens énormément à l’idée que le monde du jeu est un univers à part, et que les jeux ne servent à rien. Les jeux qui cherchent à faire passer une idée, ou à enseigner quelque chose, sont toujours de mauvais jeux, et ce n’est pas par hasard. C’est parce que tout le plaisir du jeu vient de ce que cela ne sert à rien.

Peux tu nous décrire ton processus de création?

Non, parce que c’est toujours différent. Je n’ai pas vraiment de méthode, juste quelques trucs, et ceux qui sont valables pour moi ne le sont pas nécessairement pour quelqu’un d’autre. En voici quelques uns qui marchent pour moi:
Je crois qu’un jeu, c’est d’abord une règle, et j’essaie donc, tout au long de mon travail, d’avoir des règles écrites. Je n’attends pas le dernier moment, comme le font d’autres auteurs, pour rédiger la règle. Je commence par cela, quitte à la modifier ensuite des centaines de fois.
Je teste et reteste mes prototypes, mais je ne fais jamais de “test en aveugle” auquel je ne participerai pas. Je n’en vois pas bien l’intérêt, il me semble que je vois mieux les problèmes quand je suis dans le jeu.
Je fais des prototypes moches, avec peu ou pas de dessins. Si le jeu fonctionne comme cela, ce sera encore mieux avec de superbes illustrations. Si vous faites un prototype qui a l’air d’un jeu édité, vous aurez beaucoup de mal à le changer si ça ne fonctionne pas, et si ça fonctionne, vous ne saurez jamais quelle sont les parts des illustrations et du jeu lui-même dans le plaisir du joueur.

Je fais tout en anglais, car l’anglais est une langue plus directe et plus précise, ce qui est très important pour des règles de jeu. Et travailler dans une langue étrangère force à avoir l’esprit clair et à ne pas faire trop compliqué.

Quelles sont les difficultés que l’on peut rencontrer?

La principale, c’est un jeu qui ne marche vraiment pas. Il faut laisser tomber et passer à autre chose.

Quel serait les conseils que tu donnerais à un jeune auteur qui se lancerait?
J’ai écrit des trucs là dessus sur mon blog, je les y renverrai donc. Par exemple :
Comment écrire des règles : http://faidutti.com/blog/?p=9909

Conseils aux aspirants auteurs de jeu : http://faidutti.com/blog/?p=8364

Tu crée beaucoup de jeux avec Bruno Cathala, comment vous êtes vous rencontrés?

C’est lui qui m’avait contacté, quand j’étais déjà un peu connu et qu’il n’était qu’un auteur débutant. Il m’avait envoyé le prototype de son Sans Foi ni Loi, que j’avais beaucoup aimé et j’avais convaincu Descartes de le publier.

Quel est le jeu dont tu es le plus fier?

Peut-être Waka Tanka. Il ne s’est pas trop vendu, mais je trouve vraiment que c’est une variante infiniment plus subtile du bon vieux Menteur.

Quel est le jeu, dont tu es l’auteur, que tu souhaiterais re-designer et que deviendrait-il?

Peut-être Key Largo, on devrait pouvoir faire plus simple.

En tant que joueur, quel est/ quels sont tes jeux préférés? Pourquoi ceux là?

Ça change tout le temps, mais en ce moment, j’aime beaucoup des party game comme Krazy Wordz, Just One ou Codenames.

As tu un scoop à nous partager?

Avant hier, on a commencé à discuter d’un jeu avec Matthew Dunstan. Je ne sais pas encore si ça débouchera sur quelque chose.

Pour continuer cette interview, si on sortait le jeu “Questions de Merde”?

Je tire 3 cartes, prêts?

voici les questions de la première carte:

Quelle est la toute dernière chose que tu fais avant d’aller au lit?

Regarder mes mails. 

Quel talent as-tu gâché?

J’étais bon en maths, j’ai fait des études littéraires… Mais c’est sans doute mieux.

Je t’invite à une soirée déguisée. Comment t’habilles-tu?

En pirate ou en rabbin, j’ai la tête qui convient.

Voici les questions de la deuxième carte:

Que dirait ton ordinateur s’il pouvait parler de toi?

Que ce n’est pas lui qui est trop lent, c’est moi qui vais trop vite.

Qu’est ce qui devrait changer dans la mentalité française?

Je ne crois pas qu’il y ait une mentalité française. On a beaucoup tendance à exagérer les différences culturelles.

Quitte à mourir en héros, quelle situation choisirais-tu?

Sur une barricade.

Voici les questions de la dernière carte?

Si tu pouvais apprendre une seule phrase à ton perroquet, laquelle choisirais-tu?

Je me vois très mal avec un perroquet.

Quelle blague pourrie t’as déjà fait rire?

Toutes les histoires de M et Mme machin ont un fils. 

Quel est ton rayon préféré au supermarché?

Les légumes.

Merci infiniment Bruno d’avoir répondu à mes questions! On attendra ton livre sur les licornes avec impatience!

Chers lecteurs, si vous avez aimé les dernières questions de cette interview, vous pouvez les retrouver dans le jeu “Questions de Merde “ chez Le Droit de Perdre.

questions de merde

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